573 [Assemblée nationale ] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [2 août 1790.] rendus au corps social, quand leur importance et leur durée méritent ce témoignage de reconnaissance. La nation doit aussi payer aux citoyens le prix des sacrifices qu'ils ont faits à l'utilité publique. Art. 2. Les seuls services qu'il convient à l'Etat de récompenser sont ceux qui intéressent la société entière. Les services qu'un individu rend à un autre individu ne peuvent être rangés dans cette classe, qu'autant qu'ils sont accompagnés de circonstances qui en font réfléchir l'effet sur tout le corps social. Art. 3. Les sacrifices dont la nation doit payer le prix sont ceux qui naissent des pertes qu'on éprouve en défendant la patrie, ou des dépenses qu'on a faites pour lui procurer un avantage réel et constaté. Art. 4. Tout citoyen qui a servi, défendu, illustré, éclairé sa patrie, ou qui adonné un grand exemple de dévouement à la chose publique, a des droits à la reconnaissance de la nation, et peut, suivant la nature et la durée de ses services, prétendre aux récompenses. Art. 5. Les marques d'honneur décernées par la nation seront personnelles et mises au premier rang des récompenses publiques. Art. 6. Il y aura deux espèces de récompenses pécuniaires : les pensions et les gratifications. Les premières sont destinées au soutien du citoyen qui les aura méritées. Les secondes à payer le prix des pertes souffertes, des sacrifices faits à l'utilité publique. Art. 7. Aucune pension ne sera accordée à qui que ce soit avec clause de réversibilité ; mais, dans le cas de défaut de patrimoine, la veuve d'un homme mort dans le cours de son service public pourra obtenir une pension alimentaire, et les enfanis être élevés aux dépens de la nation, jusqu'à ce qu'elle les ait mis en état de pourvoir eux-mêmes à leur subsistance. Art. 8. Il ne sera compris dans l'état des pensions que ce qui sera accordé pour récompense de services : tout ce qui sera prétendu à titre d'indemnité, de dédommagement, comme prix d'aliénation, ou autres causes semblables, sera placé dans la classe des dettes de l'Etat, et soumis aux règles qui seront décrétées pour la liquidation des créanciers de la nation. Art. 9. Ou ne pourra jamais être employé, sur l'état des pensions, qu'en un seul et même article. Ceux qui auraient usurpé, de quelque manière que ce soit, plusieurs pensions, seront rayés de la liste des pensionnaires et .privés des grâces qui leur auraient été accordées. Art. 10. Nul ne pourra recevoir en même temps une pension et un traitement : aucune pension ne pourra être accordée sous le nom de traitement conservé et de retraite. Art. 11, 11 ne pourra être concédé de pension à ceux qui jouissent d'appointements, gages ou honoraires, sauf à leur accorder des gratifications s'il y a lieu. Art. 12. Un pensionnaire de l'Etat ne pourra recevoir de pension, ni sur la liste civile ni d'aucune puissance étrangère. Art. 13. La liste civile étant destinée au payement des personnes attachées au service particulier du roi, et à sa maison, tant domestique que militaire, le Trésor public demeure déchargé de toutes pensions et gratifications qui peuvent avoir été accordées, ou qui le seraient par la suite aux personnes qui auraient été, sont, ou seront employées à l'un ou l'autre de ces services. Art. 14. Il sera destiné, à l'avenir, une somme de 12 millions de livres, à laquelle demeurent fixés les fonds des pensions, dons et gratifications ; savoir: 10 millions pour les pensions, et 2 millions pour les dons et gratifications. Dans le cas où le rem placement des pensionnaires décédés ne laisserait pas une somme suffisante pour accorder des pensions à tous ceux qui pourraient y prétendre, les plus anciens d'âge et de services auront la préférence; les autres l'expectative, avec l'assurance d'être les premiers employés successivement. Art. 15. Au delà de cette somme, il ne pourra être payé ni accordé pour quelque cause, sous quelque prétexte ou dénomination que ce puisse être, aucunes pensions, dons et gratifications, à peine, "contre ceux qui les auraient accordées ou payées, d'en répondre en leur propre et privé nom. Art. 16. Ne sont compris dans la somme de ces 10 millions atfectés aux pensions, les fonds destinés aux invalides, aux soldes et demi-soldes tant de terre que de mer, sur la fixation et distribution desquels fonds l'Assemblée se réserve de statuer, ni les pensions des ecclésiastiques qui continueront d'être payées sur ^les fonds qui y seront affectés. Art. 17. Aucun citoyen, hors le cas de blessures reçues, ou d'infirmités contractées dans l'exercice de fonctions publiques, et qui le mettent hors d'état de les continuer, ne pourra obtenir de pension qu'il n'ait trente ans de service effectif et ne soit âgé de cinquante ans : le tout sans préjudice à ce qui sera statué par les décrets particuliers relatifs aux pensions de la marine et de la guerre. Art. 18. Il ne sera jamais accordé de pension au delà de cedonton jouissaità titre de traitement ou appointement dans le grade que l'on occupait. Pour obtenir la retraite d'un grade, il faudra y avoir passé le temps qui sera déterminé par les décrets relatifs à chaque nature de service; mais quel que fût le montant de ces traitements et appointements, la pension, dans aucun cas, sous aucun prétexte et quels que puissent être le grade ou les fonctions du pensionné, ne pourra jamais excéder la somme de 10,000 livres. Art. 19. La pension accordée à trente ans de service sera du quart du traitement, sans toutefois qu'elle puisse être moindre de 150 livres. Art. 20. Chaque année de service, ajoutée à ces trente ans, produira une augmentation progressive du vingtième des trois quarts restants de ces appointements et traitements; de manière qu'après cinquante ans de service, le montant de la pension sera de la totalité des appointements et traitements, sans que, néanmoins, comme on l'a dit ci-devant, celte pension puisse jamais excéder la somme de 10,000 livres. Art. 21. Le fonctionnaire public, ou tout autre citoyen au service de l'Etat, que ses blessures ou infirmités obligeront de quitter son service ou ses fonctions avant les trente années expliquées ci-dessus, recevra une pension déterminée par la nature et la durée de ses services, le genre de ses blessures et l'état de ses infirmités. Art. 22. Les pensions ne seront accordées que d'après les instructions fournies par les directoires de départements et de districts, et sur l'attestation des officiers généraux et autres agents du pouvoir exécutif et judiciaire, chacun dans la partie qui les concerne. Art. 23. A chaque session du Corps législatif, le roi lui fera remettre la liste des pensions à accorder aux différentes personnes qui, d'après les règles ci-dessus, seront dans le cas d'y pré-